Chaque fois que l’éducation sexuelle est évoquée au Maroc, elle suscite angoisse chez les éducateurs et polémique chez les décideurs. Cette notion n’a pas d’existence dans la tradition écrite marocaine, bien qu’il y ait des textes traitant d’us sexuels. En continuité avec ce « passé » de l’éducation sexuelle, le terme « sexuel » suggère de la réduire, aujourd’hui, à l’acquisition d’un savoir-faire sexuel, désormais indépendant de l’âge et du statut matrimonial. Cette définition à la fois restrictive et permissive de l’éducation sexuelle la transforme en objet inquiétant dans un contexte social qui entre, malgré lui, dans l’ère de la désinstitutionnalisation du sexe. En effet, outre les connaissances biologiques, l’éducation sexuelle comprend des orientations éthiques libératrices de l’activité sexuelle de l’individu. En ce sens, elle est à la fois transmission d’un savoir bio-médical et psychologique et d’une éthique basée sur la valorisation du plaisir en soi et l’égalité des sexes. En tant que telle, l’éducation sexuelle n’est pas mécaniquement acceptée, car au nom d’une spécificité arabo-islamique mythifiée, qui sert de refuge à une identité en crise, on veut toujours soumettre la sexualité au mariage. Du coup, l’éducation sexuelle est loin d’être une notion qui va de soi. Les questions suivantes sont posées tant par la population que par les décideurs : qu’est-ce l’éducation sexuelle ? Qui doit la dispenser ? A qui doit-elle être dispensée ? Comment doit-elle être dispensée ? Ces interrogations expriment une certaine angoisse. Ainsi, la définition, les cibles, les modes de transmission et la langue véhiculaire, en un mot les programmes de l’éducation sexuelle sont encore des questions largement débattues.
